Les grands courants en linguistique - Français

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samedi 4 janvier 2020

Les grands courants en linguistique

 Les grands courants en linguistique




I La Linguistique et ses écoles


Il faut savoir que la linguistique regroupe un certain nombre d'écoles qui ont toutes en commun d'avoir le langage comme objet d'étude mais qui n'abordent pas forcément les problèmes du même point de vue.

Les linguistiques internes sont des disciplines autonomes. On y trouve les linguistiques structurales proprement dites (fonctionnalisme, distributionnalisme, psychosystématique, générativisme reliés au structuralisme à des degrés divers) et les linguistiques énonciatives qui en découlent. Certaines de ces dernières, comme celle de Culioli, se considèrent comme post-structurales. De plus, certaines linguistiques dites internes se suffisent à elles-mêmes alors que d'autres sont associées à une discipline différente (sociologie, ethnologie, psychologie, neurologie...). Par exemple, la sociolinguistique étudie la langue comme révélateur sociologique.



II Historique :


Avant 1916 on s'occupait surtout de linguistique historique (philologie). Saussure était à l'origine un spécialiste de l'indo-européen. En 1875, il avait publié un ouvrage diachronique sur les voyelles de l'indo-européen.

En 1916, deux de ses étudiants publient -> Saussure : « Cours de linguistique générale » (1916)

De 1930 -> 1975 on constate l'hégémonie du structuralisme

Les linguistiques énonciatives apparaissent en 1956 avec « La nature des pronoms » de Benveniste et n'ont cessé d'évoluer depuis.



III L'objet du structuralisme


La linguistique structurale est un courant qui réunit un groupe d'écoles dans lesquelles la langue est étudiée comme un système doté d'une structure décomposable.



Selon les courants la sémantique est mise à l'écart ou intégrée dans les autres grandes catégories. Dans le cadre de ce cours nous postulerons pour la seconde vision des choses. De la même façon certains linguistes préfèrent parler de morpho-syntaxe plutôt que de séparer radicalement les domaines de la morphologie et de la syntaxe sur lesquelles sont basées les grammaires scolaires.

Ainsi le langage est découpé en niveaux (strates), chacun étudié par une discipline qui lui est propre :

traits

(sept traits majeurs :
nasalité- aperture - labialité - antériorité- voisement - mode d'articulation - point ou lieu d'articulation)

Phonétique

(Description des unités sonores de base)

Phonèmes

(36 en Français)

Phonologie

(Étude du rôle des sons dans le système linguistique)

Syllabe

(quelques centaines)

Morphologie

(Étude de la structure grammaticale des mots)

Mots

(environ 60 000, mais la liste n'est pas exhaustive)

Lexicologie

(Étude des vocabulaires composant le lexique d'une langue)

Propositions

Sémantique

(Étude de la signification)

Phrases

(nombre illimité)

Syntaxe

(Étude des combinaisons et des relations entre les formes qui composent la phrase)

Énoncés

(nombre illimité)

Énonciation et pragmatique

(Étude de la production et de la reconnaissance langagière par des énonciateurs dans une situation donnée)


Le structuralisme a pour qualité d'être rigoureux. Le revers de la médaille est une tradition réifiante (chosifiante) venant de la philologie (étude des langues anciennes) et de la philosophie du scientisme et du positivisme d'Auguste Comte, du monisme. La démarche découlant des sciences de la nature consiste à purifier l'objet d'étude.

C'est la tradition aristotélicienne. Les phénomènes langagiers sont considérés comme unitaires, stables. On est dans la logique du réductionnisme : On doit faire entrer ce qu'on décrit dans un moule rigide, quitte à découper ou à allonger. (Mythe du lit de Procuste)


IV Les grands courants structuralistes


1. Fonctionnalisme (École européenne de Martinet) Ce courant dégage une procédure pour analyser la phonologie, puis la généralise aux autres niveaux. (morphologie, lexicologie, syntaxe).

Les unités n'ont de valeur linguistique que par rapport à leurs possibilités d'opposition ou de combinaison.
2. Distributionnalisme, école américaine,en parallèle au fonctionnalisme. (Harris et Bloomfield) Le distributionnalisme a eu ses heures de gloire des années 1930 à 1950. Cette école est issue du behaviorisme avec l'idée du comportement langagier en stimulus /réponse. On se base sur un empirisme radical, sur ce qu'on constate. La sémantique est considérée comme du mentalisme. La langue est un corpus (un recueil de données linguistiques brutes dont on a une trace perceptible) et la place du sens n'est pas dans la linguistique. La description se fait selon le modèle de la linguistique anthropologique lors de la découverte d'une langue étrangère.

L'un des grands ouvrages en est : Bloomfield (1933), Language

Série de combinaisons et de sélections dans le paradigme qu'on installe sur le syntagme.

V L'influence du structuralisme


Les linguistiques structurales vont influencer :a . La linguistique générative de Chomsky. Pour le mouvement génératif, on part de la syntaxe dont on dégage un corps de concepts puis on les généralise à la phonologie, la morphologie et la sémantique.
b. La psychosystématique de Gustave Guillaume Dynamique basée sur la morphologie.

VI Les grands poncifs du structuralisme

1. Paradigme et syntagme


PARADIGME
SYNTAGMEAxe de sélection sur lequel on peut effectuer des commutations Axe de combinaisons où on opère des permutations


ex. "j'ai vu mon [匽"
On peut illustrer cette idée d'axe et de connexion de contexte par rapport à la connexion d'opposition par le principe de la machine à sous.
 

Axe de combinaisons de formes : ex. citron - pomme - orange (syntagme)




Il existe un autre axe non visible, opposition à d'autres formes sur un axe de sélection. (paradigme)


Dans un exemple comme:


À un premier niveau on met en opposition les deux phonèmes /b/ et /p/. Ce qui est étudié c'est le rôle distinctif joué par l'opposition "p" et "b" qui apportera un sémantisme différent.

À un second niveau, celui du morphologique, on observera la structure "il a -u" où « u » joue un rôle fondamental. On verra qu'on a affaire à deux passés composés de deux verbes du même groupe commutables sur un axe paradigmatique.

Au troisième niveau, celui des lexèmes, on comparera "boire" à "pouvoir" qui renvoient tous deux à une image mentale empirique.

Au quatrième niveau, on s'intéressera à la syntaxe, autrement dit aux combinaisons de formes.

Pour résumer, nous dirons qu'aux yeux des structuralistes, les formes linguistiques, quelles qu'elles soient, sont reliées entre elles selon deux fonctions :
fonction distinctive (mise en opposition)
fonction combinatoire (possibilité de mise en contexte)
ou les deux (ex. Le rouge et le noir)

Le langage humain se singularise par le phénomène de la double articulation :
La première articulation est constituée par les unités significatives que sont les unités lexicales et grammaticales. Le unités distinctives dépourvues de sens en elles-mêmes forment la deuxième articulation.

On peut schématiser de la façon suivante :
Nomenclature : liste de mots
ex: dictionnaire
Structure : agencement de combinaisons


On peut faire une comparaison avec un jeu d'échec. Chaque pièce se déplace différemment sur l'échiquier, mais la combinaison de ces pièces fait que chaque pièce prend sa valeur par rapport au reste du jeu.


2. Forme et substance

À chacun des signifiants et signifiés que Louis Hjelmslev (1968) appelle expression et contenu, on peut attribuer une forme et une substance. Ainsi, on pourrait faire la représentation suivante :




VII L'appréhension des phénomènes énonciatifs.

Dans la tradition stucturale née de Saussure la langue est un objet d'étude extérieur au monde et s'oppose à la parole et ne prend pas en compte les situations discursives.
Toutefois, en grammaire générative on considère la langue en mouvement et on envisage le concept de "locuteur idéal »pourvu d'une compétence qui sera mise à profit lors de la performance. Cependant la co-énonciation n'est pas prise en considération.
Les énonciativistes pensent que qui dit énonciateur implique co-énonciateur (allocutaire).

Ils prendront le problème sous l'angle du repérage (localisation d'une notion par rapport à une autre notion ou par rapport à la situation), et remarqueront que l'un de ces énoncés n'est pas autonome et implique un ancrage contextuel ou situationnel pour être considéré comme valide.

Au niveau du verbe:

- ordonnancement des procès,

- procès par rapport à la situation présente.

Par exemple, dans « il a pu » comparé à « il a bu », on remarque que « il »renvoie à un élément préconstruit ou préasserté :

« Pierre, il ne se sent pas bien, il a bu ».

Par ailleurs, on a affaire dans les deux cas à un procès accompli au moment de l'énonciation. Cependant, on remarquera le fait que « pu » appelle généralement une suite et que l'énoncé perd sa signification, sans ce repérage :

« Il a pu voir Marie. »

De plus, « bu » marque le constat d'un procès, alors que « pu » renvoie à une modalité, c'est à dire un commentaire de l'énonciateur sur les propriétés du sujet.


L'analyse des formes se fera d'un point de vue différent selon les niveaux d'analyse:Au niveau syntaxique fonction du constituant
Au niveau sémantique rôle de la notion
Au niveau énonciatif statut de l'information


Lorsqu'on analyse les formes, tous les niveaux devraient être pris en compte.

Ainsi le même objet linguistique pourra changer d'étiquette selon le point de vue de l'analyse :
Phrase sur le plan formel
Proposition sur le plan sémantique
Énoncé sur le plan énonciatif

VIII La linguistique énonciative


Il s'agit d'un groupe d'écoles de linguistique étudiant le langage tel que mis en situation par l'activité d'un énonciateur.La linguistique énonciative postule, et ne renie pas le structuralisme. Elle en hérite, c'est une étape de travail :1.travail de taxinomie
2.construction d'une continuité.

Avec l'énonciation, c'est l'acte même de produire un énoncé et non simplement l'énoncé lui-même qui est étudié.

C'est la langue dans son utilisation qui est étudiée, et non la langue réifiée comme une langue morte, comme c'est le cas pour le structuralisme qui considère le référent comme ne faisant pas partie de la langue mais du monde. Ce dernier ne fait pas partie des objets de réflexion.

Ainsi, contrairement aux structuralistes qui pensent qu'on ne peut pas connaître les sens d'un mot sans l'opposer ou le combiner à d'autres formes linguistiques, les énonciativistes pensent qu'on peut se passer du contexte linguistique, si la situation nous met en présence du référent.

ex. En forêt, l'énonciateur pourra dire :

Une oronge est un champignon

mais aussi :

Une oronge, c'est ça.
Tiens ! Une oronge.

sans faire appel au contexte linguistique.

Les formes linguistiques sont prises en charge par des énonciateurs et reçues par des co-énonciateurs qui y répondent. Le fait qu'il y ait un énonciateur et un co-énonciateur détermine le fonctionnement des formes. On peut même dire que le fait qu'il y ait un énonciateur et un co-énonciateur détermine la valeur sémantico-syntaxique des formes.
Les grands noms de la linguistique énonciative
Benveniste Les deux articles les plus considérables sont :

« La nature des pronoms » (1956) dans lesquels il pose les jalons de l'énonciation sans la nommer

« L'appareil formel de l'énonciation » (1970) où il explique les fondements de l'énonciation en connaissance de cause.

Benveniste se réclame du structuralisme de Saussure et rend hommage à Roman Jakobson. Il remet en question la dichotomie langue/parole, opposition introduite de façon opératoire par Saussure.

« Rien n'est dans la langue qui n'ait d'abord été dans le discours ».

On lui reproche de mélanger l'activité de langage et le monde.

L'une des questions qu'il se pose préalablement est : Quel est le signifié de « je » dont le référent varie en fonction du locuteur, instance de discours ? Certaines formes ne sont pas aussi stables que « table » :

Emmène-moi ailleurs.

Demain, on rase gratis

Passe-moi ce livre (accompagné d'une monstration) deixis. (je, ici, maintenant)

Ces même remarques peuvent s'appliquer au verbe aller/venir à l'aspect passé composé : « Il est arrivé »
Ducrot S'inspire des philosophes du langage Austin et Searle. Il montre l'importance de la situation discursive et de la pragmatique. Il intègre la composante pragmatique à la sémantique. On peut dire qu'il relève d'un structuralisme divergent. On ne peut pas décrire les énoncés sans faire référence aux conditions énonciatives.

Il pose l'existence d'un énoncé, noyau sémantique stable pouvant diverger selon les conditions d'énonciation.

forces locutoire, illocutoire, effet perlocutoire.

« qu'est-ce que tu fabriques ? » = « arrête de faire ce que tu fais ».

« justement »

« décidément »

Ducrot s'intéresse aussi à l'implicite (ce qui est dit sans dire) :

- les présupposés
Jacques continue de fumer (présuppose que Jacques fumait avant)

- les sous-entendus
Il ne déteste pas le vin (sous-entend « il aime beaucoup le vin »)

Les présupposés sont indéniables mais on peut nier avoir fait un sous-entendu.
Culioli Quant à lui est plus dans la mouvance de Benveniste même s'il s'inspire d'une philosophie stoïcienne, basée sur les processus et les changements d'états. On s'intéresse plus au dicible (lekton traduit en latin par dictum) qu'au dit. (Curieusement, il se rapproche en cela de Saussure et de Chomsky)

Il existe pour chaque énonciateur un faisceau de propriétés physico-culturelles (physique ou social)

La Notion est prédicative et modalisable.

C'est le monde de l'Instabilité

Les mots sont des capteurs de l'organisation du monde.

Le Domaine notionnel est déformable.

ex. Pour moi, ce n'est pas un chien, c'est une saucisse sur pattes.

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