Gabriel-Joseph de Lavergne, vicomte de Guilleragues (1628-1685)
Ecrivain, courtier, diplomate français.
Issu d'une famille de la noblesse des environs de Bordeaux, Guilleragues reçut d'abord une éducation au Collège de Navarre à Paris. Il y demeura ensuite pour étudier le droit. Il revint ensuite à Bordeaux pour intégrer le Parlement de la ville. Par la suite, il occupa le poste de Premier Président de la Cour des Aides de Bordeaux.En 1651, il fit la connaissance d'Armand 1er de Bourbon, prince de Conti, qui s'attacha à lui à cause de son esprit et dont il devint le secrétaire. Après le décès de ce dernier, Guilleragues décida de monter à Paris et rejoindre la cour de Louis XIV. A Paris, il intégra très vite les salons littéraires qui dictèrent la vie culturelle de l'époque, et fréquenta Racine, Nicolas Boileau - qui le qualifia d'homme le plus agréable de France, Molière, Madame de Sévigné et le duc de La Rochefoucauld. Il prit également pendant quelques temps la tête de la Gazette de Paris.
Protégé de Madame de Maintenon, Guilleragues entra d'abord au service de Louis XIV comme secrétaire, avant de parvenir à se faire nommer comme ambassadeur du Roi à Constantinople en 1679. Il y décéda en 1685.
Guilleragues ne publia que deux oeuvres : « Valentins » (1668), un recueil de poèmes, et « Lettres portugaises ». C'est cette dernière oeuvre qui resta pour la postérité, tant pour son contenu que pour les rebondissements qui jalonnèrent son histoire avant que les spécialistes ne l'attribuassent finalement à Guilleragues.
En 1668, un privilège fut accordé pour la publication d'un volume intitulé « Les valentins, lettres portugaise, épigrammes et madrigaux de Guilleraques ». L'éditeur Claude Barbin publia un an plus tard le livre rendu anonyme, et qui avait désormais comme titre : « Lettres portugaises traduites en français ». On peut supposer que dans sa situation, Guilleragues souhaitait se protéger et ne pas revendiquer son oeuvre. La chose n'est pas rare à cette époque parmi ses contemporains, pour ne citer que chez Madame de la Fayette par exemple. L'éditeur en rédigea également la préface et y affirma qu'il s'agissait des traductions authentiques de vraies lettres écrites depuis un couvent par une jeune femme portugaise qui avait été séduite et abandonnée par son amant français. Le livre fit tout de suite sensation parmi les lecteurs et donna naissance à un genre, le roman épistolaire. La grande question du moment dans les salons fut alors d'identifier les personnages principaux : la religieuse, le chevalier destinataire des lettres, et enfin le traducteur.
Le succès fut tel qu'en août de la même année et en réponse aux demandes du public, Barbin publia une nouvelle édition des « Lettres portugaises » dotée de sept nouvelles lettres, toujours supposées écrites par une jeune dame de la bonne famille portugaise. L'anonymat de l'auteur permit à d'autres éditeurs de commander des copies à divers auteurs obscurs, et très vite de nombreuses suites, des ajouts et des réponses aux « Lettres portugaises » fleurirent dans toute l'Europe. L'amant français fut très vite identifié comme étant le marquis de Chamilly, qui servit dans sa jeunesse dans la cavalerie au Portugal, et le traducteur comme étant Guilleragues. Au 19e siècle, la religieuse fut identifiée comme étant une certaine Mariana Alcoforado.
L'authenticité des lettres ne fut donc pas mise en doute jusqu'au début du 20e siècle. Ce n'est qu'en 1920 que le professeur américain F.C Green découvrit le privilège original qui mentionnait le nom de Guilleragues. En 1962, le professeur Deloffre découvrit à son tour une édition des « Valentins ou Epigrammes et madrigaux » publiés par Barbin, édition dépourvue des « Lettres portugaises ». Il fit le lien avec le privilège de Green et démontre que les « Lettres » ont bel et bien été écrites par Guilleragues. Le doute n'est toutefois pas encore intégralement levé dans la tête de tous les chercheurs, et le sujet réveille régulièrement de ces débats passionnés dont la recherche en littérature est fertile.
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